The Secret Love Life of Ophelia
The Secret Love Life of Ophelia
Pièce Steven Berkoff
Traduction Olivier Dhénin
THE SECRET LOVE LIFE OF OPHELIA se présente sous la forme d’un échange de lettres entre Hamlet et Ophélie, des lettres d’amour, de séduction, de pouvoir et peu à peu de « lettres miroir » d’une folie invasive. À travers sa subtile recréation du style de Shakespeare, Steven Berkoff décortique les rapports d’Hamlet et d’Ophélie et met en évidence, avec une étonnante finesse, les mécanismes psychologiques des personnages.
Argument
Le jeu « du chat et de la souris » entre les deux personnages, suggéré dans la pièce de Shakespeare, prend ici une tournure extrême, avec les avances amoureuses de Hamlet, et aussitôt son incapacité de passer à l’action. Berkoff prête à Ophélie un érotisme dévorant : on la découvre entreprenante et passionnée, capable de déjouer les complots des rois pour protéger son amour ; mais également victime de sa frustration à l’égard d’un désir toujours alimenté et jamais assouvi. Tous ces éléments révèlent un lien de manipulation amoureuse, un territoire construit dans la perversité de celui qui s’offre pour mieux se dérober. Hamlet s’amuse à jouer à l’amoureux pudique et courtois, alors que sa tête et son corps tout entier sont obnubilés par une obsession : la vengeance du père. Tous les gestes de Hamlet s’inscrivent dans un mouvement fatal par lequel le rituel du mariage se mélange intimement à celui de la mort. Ophélie devient l’expression d’une promesse qui rompt avec le passé et qui détruit l’avenir : avec sa disparition (suicide ou accident) elle rend concrète la pulsion mortelle de Hamlet.
Par la mise en abîme des personnages de Shakespeare, Berkoff révèle la mécanique implacable d’une destruction sourde. Ainsi, les amoureux nous apparaissent comme prisonniers d’eux-mêmes, dans l’attente inutile d’une délivrance qui ne pourra pas avoir lieu : aucun ne saura trouver le geste qui sauvera l’autre, qui renouera avec la vie.
Bible
Mise en scène, costume et scénographie Olivier Dhénin
Musique Ned Rorem, Henry Purcell
Lumière Anne Terrasse
Collaboration artistique pour le costume Hélène Vergnes
Assistanat à la mise en scène Suzanne Daurat
Régie artistique Thibaut Lunet
Deux lettres extraites de la pièce
Lettre d’Hamlet à Ophélie
Mon tendre chéri si doux, doux, doux,
Il faut que tu me révèles ce secret, confie le moi,
puisqu’il t’accable de si lourdes chaines qu’on ne voit que chez les forçats
Fais moi confiance pour te libérer de ton joug.
Ne désespère pas, mon amant, car je coule
En même temps que toi, étant étroitement liée de nœuds d’amour qui sont plus résistant que l’acier le plus robuste,
Et quand tu plonges, je tombe aussi,
Et quand tu te relèves, mon esprit s’élève aussi plein de joie exubérante et tellement, tellement léger,
Prêt à monter au-delà des montagnes
Jusqu’à la lune, les étoiles et plus encore…
Mais là, je suis sur cette terre, souffrant de ton absence,
s’il te plait, viens et occupe toi de mon jardin, s’il te plait, mon seigneur
Et désherbe moi de ces laides pensées qui me perturbent
Ophélie.
Réponse d’Hamlet à Ophélie
Ô Ophélie, ma tendre et douce colombe,
Tu es la terre fertile que je me dois de cultiver et élever chaque pousse qui sortira de ton terreau chaud et accueillant.
Oui, tu es un jardin dont je dois m’occuper car moi aussi je crains les herbes empoisonnées qui veulent aspirer ta jeunesse et te faire succomber.
Non, fais-moi confiance, ma fleur si rare et si belle, je vais les couper et les arracher de leur terre ! Aucune limace méchante et dégoûtante ne grandira près de toi,
les orties ne se mêleront pas à ton herbe accueillante, aucun serpent,
près à mordre avec son venin détestable et agressif, ne se tiendra à l’ombre de tes branches.
Il y a un serpent, ma chérie, dans notre prairie,
dans ce verger où nous nous sommes souvent promenés
Comme des enfants, émerveillés par les papillons et par toutes les autres merveilles du monde. Ce serpent attend, caché avec sa langue fourchue,
prêt à planter à nouveau ses crochets haineux et cupides dans notre chair innocente et confiante, mais cette fois-ci, ne crains rien, je serai prêt à couper la tête malfaisante de ce monstre.
Il y a une pièce ce soir qui sera jouée devant cette chose dont je te parle,
notre roi sage et autoproclamé.
S’il-te-plaît, viens ma tendre, tout sera clair, le secret sera enfin dévoilé à tous,
Bien sûr, tels les acteurs chevronnés que nous sommes, nous devrons cacher
Nos cœurs battants derrière notre masque souriant
afin que personne ne découvre notre imposture secrète.
À tout à l’heure, mon petit cœur, je souffre de ne pouvoir te tenir, petite colombe toute douce.
Hamlet.